Les trottoirs artistiques de Lisbonne menacés par les politiques de rigueur
Par Levi FERNANDES
Vagues, cordages, arabesques ou motifs géométriques ornent les trottoirs de Lisbonne : autant d'oeuvres d'art en mosaïque qui constituent l'une des images de marque de la capitale mais qui sont désormais menacées alors que le pays, sous assistance financière, applique de sévères coupes budgétaires.
Sur son petit tabouret en bois, Jorge Duarte, un paveur d'une cinquantaine d'année, répète le même geste, d'une grande précision, à longueur de journée depuis 26 ans.
Marteau à la main, il taille des petits cubes de calcaire blanc et de basalte noir pour combler les trous des trottoirs de l'avenue de la Liberdade, la prestigieuse artère du centre de la capitale.
La peau hâlée par des années de travail en plein air, Jorge Duarte intègre la vingtaine d'ouvriers de "la brigade de paveurs" de la mairie de Lisbonne, souvent appelés les "orfèvres du sol lisboète", chargés de l'entretien de plusieurs kilomètres de trottoirs ou de chaussées.
"Quand je suis arrivé, nous étions des dizaines de paveurs. Aujourd'hui, nous ne sommes plus qu'une vingtaine. Et plus très jeunes", regrette-t-il.
Au même titre que le fado, les azulejos ou le vin de Porto, la "calçada portuguesa" (chaussée à la portugaise) s'est imposée comme un symbole culturel.
Ces trottoirs traditionnels, dont les motifs évoquent souvent l'âge d'or des découvertes portugaises, se sont développés au XIXe siècle. Les motifs tout en mosaïque de pavés ont souvent un rapport avec la mer et le promeneur marche ainsi sur des vagues, des ancres, des poissons...
Le château Saint-Georges, perché sur l'une des collines de la ville, est le premier lieu à avoir été pavé selon cette technique dont le succès à été tel qu'elle s'est rapidement étendue à d'autres quartiers, puis d'autres villes du pays et de l'ancien empire colonial : Afrique, Asie, Amérique du Sud.
Près de deux siècles plus tard, les mesures d'économies que le Portugal est contraint de mettre en oeuvre depuis deux ans par ses créanciers internationaux en échange d'une aide financière, risquent d'affecter les budgets destinés à l'entretien de ces véritables "tapis en pierre" qui couvrent les trottoirs de la ville.
"Notre zone d'intervention est de plus en plus vaste au fur et à mesure que le ville s'agrandit", explique M. Duarte. "On ne peut plus tout faire!", soupire-t-il.
Désormais, les trottoirs, hors des circuits touristiques, sont souvent pavés à la va-vite avec de simples pierres blanches, sans motifs. "Un regard attentif remarque que c'est du travail bâclé!", regrette M. Duarte.
"On peine à recruter"
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"Au moment de prendre ma retraite, je rêve de pouvoir dire à mes collègues, à ma fille: tu vois ces hommes là-bas, c'est moi qui les ai formés et ce sont eux qui vont me remplacer. Mais il n'y a plus personne... Si rien ne change, tout cela risque de disparaître", avertit cet ouvrier.
De son côté, la mairie confirme devoir faire des choix en raison des coûts.
"La tendance est de réduire la chaussée artistique", a indiqué à l'AFP Luisa Dornellas, une des responsables de la mairie, car l'entretien de ces trottoirs "coûte très cher à la municipalité". Le mètre carré de chaussée artistique s'élève à environ 90 euros.
Pour autant, Mme Dornellas affirme que la municipalité va continuer d'investir dans l'entretien de ces trottoirs, qui sont l'une des grandes attractions de la ville, et précise qu'une nouvelle formation de paveurs est prévue prochainement.
Mais "on peine à recruter", indique Nuno Serra, responsable de l'école de paveurs et jardinage de Lisbonne, car "le métier n'est pas très attractif".
"C'est un profession pénible, où il faut être assis ou à genoux toute la journée, qui manque souvent de reconnaissance sociale, avec des salaires très bas", qui dépassent à peine les 700 euros net par mois, observe-t-il.
Menacé au Portugal, cet art unique se perpétue toutefois dans d'autres villes à travers le monde, dont l'histoire a été marquée par la culture portugaise. Du Brésil au Cap-Vert ou du Timor oriental au Canada, où réside une importante communauté portugaise, des chaussées artistiques, conçues selon la technique lisboète, ornent des villes des quatre coins du monde.
Sources:
AFP - 24/06/2013
A écouter: http://www.franceinter.fr/emission-lactualite-du-bout-du-monde-les-trottoirs-artistiques-de-lisbonne-menaces-par-les-politique
A lire:
http://www.portalangop.co.ao/motix/fr_fr/noticias/internacional/2013/5/26/Les-trottoirs-artistiques-Lisbonne-menaces-par-les-politiques-rigueur,d982dfc5-536d-43c0-9ae1-40e96d5b38b9.html
http://www.courrierinternational.com/depeche/newsmlmmd.urn.newsml.afp.com.20130624.2c13fc9a.0f28.48ba.9001.ab68efea66a2.xml
http://www.alvinet.com/actualite/articles/lisbonne-les-trottoirs-artistiques-menaces-par-la-rigueur-17592119.html
A voir: http://article.wn.com/view/2013/06/24/Lisbonne_les_trottoirs_artistiques_menaces_par_la_rigueur_4/#/video
http://www.20minutes.fr/monde/portugal/1179193-20130624-lisbonne-trottoirs-artistiques-menaces-rigueur
http://news.fr.msn.com/m6-actualite/monde/a-lisbonne-les-trottoirs-artistiques-menac%C3%A9s-par-la-rigueur
http://fr.news.yahoo.com/lisbonne-trottoirs-artistiques-menac%C3%A9s-rigueur-115157431.html
http://www.google.com/hostednews/afp/article/ALeqM5gPVNJ5DkILE528iSBy7WVF1L1rRA?docId=2c13fc9a-0f28-48ba-9001-ab68efea66a2
Mosaicos en aceras de Lisboa amenazados por políticas de austeridad
Por Levi FERNANDES
Olas, cordeles, arabescos o motivos geométricos: Lisboa es conocida por su luz, pero también por la belleza de sus aceras. Pero estas verdaderas obras de arte al aire libre están ahora amenazadas por las políticas de austeridad debido a la crisis económica.
En su pequeño taburete de madera, Jorge Duarte, un 'calceteiro' del Ayuntamiento de Lisboa, talla un trozo de piedra con precisión, como viene haciendo cada día desde hace 26 años.
Martillo en mano, corta trozos de caliza blanca y basalto negro para crear y mantener lo que él llama, con orgullo, "las alfombras de piedra" sobre la Avenida da Liberdade, la principal arteria del centro de la capital, pero también en plazas y aceras de la ciudad.
Con la piel curtida por el trabajo a la intemperie, Duarte integra la veintena de obreros de la "brigada de empedradores" de Lisboa, a menudo llamados "orfebres del suelo", responsables del mantenimiento de varios kilómetros de aceras.
"Cuando empecé, éramos decenas colocando adoquines. Hoy en día no somos más de veinte", se lamenta.
Al igual que el fado, los azulejos o el vino de Oporto, la "Calçada portuguesa" se ha convertido en un símbolo cultural del país y una marca de su patrimonio urbano.
Estas tradicionales calzadas, cuyos diseños a menudo evocan la época dorada de los descubrimientos portugueses, fueron desarrolladas en el siglo XIX. Los motivos de estos mosaicos de adoquines a menudo tienen una relación con el mar y así, el peatón camina sobre olas, anclas, peces.
El Castillo de San Jorge, encaramado en lo alto de una colina de la ciudad, fue el primero pavimentado con esta técnica, cuyo éxito fue tal que pronto se extendió a otros barrios, y luego a otras ciudades y países del antiguo imperio colonial portugués, en África, Asia, América del Sur.
Casi dos siglos después, las medidas de austeridad que Portugal ha sido obligado a poner en práctica los dos últimos años por parte de sus acreedores internacionales, a cambio de ayuda económica, corren riesgo de afectar el presupuesto para la conservación de las tradicionales "calçadas".
"Nuestra área de operaciones es cada vez mayor a medida que la ciudad crece", dice Duarte. "No podemos hacer todo", suspira.
Además, fuera del circuito turístico, las aceras suelen adoquinarse con simples piedras blancas, sin ningún diseño. "Una mirada atenta muestra que es un trabajo descuidado", señala Duarte.
"Es difícil reclutar"
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Pero tener veredas artísticas no es fácil, ni barato.
"Yo soñaba que, cuando me jubilara, iba a poder decirle a mis colegas, a mi hija: 'A esos hombres que están ahí, los he formado yo y son quienes me van a reemplazar'. Pero no, no hay nadie. Y eso es lo que me duele. Si nada cambia, todo podría desaparecer", advierte Duarte.
La alcaldía, en tanto, confirma tener que tomar decisiones debido al costo de las famosas "calçadas".
"La tendencia es reducir la calzada artística", dijo a la AFP una de las responsables del Ayuntamiento, Luisa Dornellas. El mantenimiento de las aceras "es muy costoso para el municipio". Y agregó: el metro cuadrado de este tipo de pavimento cuesta unos 90 euros.
Sin embargo, Dornellas aseguró que el municipio seguirá invirtiendo en el mantenimiento de las aceras, que son una de las principales atracciones de la ciudad. Para tratar de conservar sus decenas de kilómetros de mosaicos, el Ayuntamiento de Lisboa acaba de reabrir una escuela de formación.
Pero, aún así, "es difícil reclutar", dijo Nuno Serra, director de la escuela de empedrado y jardinería de Lisboa, porque "el trabajo no es muy atractivo".
"Esta es una profesión difícil, se debe estar sentado o de rodillas durante todo el día, a menudo carece de reconocimiento social, con salarios muy bajos", que apenas superan los 700 euros netos al mes, observó.
Amenazado en Portugal, este arte único persiste en todo lugar marcado por la cultura lusitana. De Brasil a Cabo Verde a Timor Oriental, o a Canadá, donde hay una gran comunidad portuguesa, los pavimentos artísticos, diseñados con la técnica de Lisboa, adornan las veredas de ciudades en todo el mundo.
lf/bir/cac/ad/ja
Source: AFP -- 30/07/2013
A lire: http://www.oem.com.mx/diariodelsur/notas/n3071342.htm
http://www.revistasucasa.com/articulo/actualidad/mosaicos-en-aceras-de-lisboa-amenazados-por-pol%C3%ADticas-de-austeridad
http://www.google.com/hostednews/afp/article/ALeqM5joqiZNRRjOuN8Lvgc_nU2-0o2tuw?docId=CNG.2442984e8928ca2da03771d95f8e2e3f.221&hl=es
A voir: http://www.youtube.com/playlist?list=PL3oLC6iScIxCghi5bcYFJO-kYhNPTuPiH
Tailleur de pierre paveur, l'orfèvre des chaussées portugaises
Par Lévi FERNANDES
Une poignée d'artistes ouvriers continuent de perpétuer l'art plus que centenaire du pavage des chaussées portugaises, véritables mosaïques blanches et noires qui tapissent les trottoirs des villes pour le plus grand plaisir des passants.
"Le paveur c'est un peu l'orfèvre des trottoirs portugais", se plaît à souligner José Reis, chef d'équipe de la trentaine d'ouvriers chargée à la mairie de Lisbonne du revêtement des trottoirs de la capitale.
Rien ne prédestinait pourtant José Reis, 46 ans, originaire du Nord-Ouest, à devenir maître paveur. Mais, serrurier de formation, il s'aperçoit très vite qu'il pourrait mieux gagner sa vie en optant pour un métier difficile mais qui offrait à l'époque des débouchés. A 24 ans, il remporte un concours et devient artisan paveur au service de la municipalité de Lisbonne.
"Aujourd'hui, j'aime mon métier, mais à l'époque je l'avais choisi uniquement parce que le salaire était plus intéressant. Puis j'ai commencé à y prendre goût, on a apprécié mon travail et j'ai fini par rester", confie-t-il à l'AFP.
Ces chaussées traditionnelles, véritables oeuvres d'art en plein air qui se déroulent sous les pieds des passants remontent au XIXème siècle. Les motifs souvent maritimes -- cordages, vagues, caravelles -- évoquent l'âge d'or des découvertes portugaises (fin XVe-XVIème siècle).
Le château Saint-George, perché sur l'une des sept collines de Lisbonne, est le premier lieu à avoir été pavé suivant "le principe de la chaussée artistique" au début des années 1840, explique l'architecte José Aparicio, attaché à la municipalité.
L'idée est partie du gouverneur du château qui a fait appel aux forçats pour ce travail. Le succès a été tel qu'on lui a demandé de paver le Rossio, la place principale de Lisbonne. Le reste du pays ne tardera pas à adopter "la chaussée artistique".
La technique est simple mais laborieuse. Des petits cubes de calcaire blanc ou de basalte gris et noir, de 3 à 4 cm de côté, sont retaillés sur place, puis posés et méticuleusement assemblés un à un, à l'aide d'un marteau, de façon à reproduire, à partir d'un cadre en bois, les motifs préalablement réalisés par des artistes.
Un ouvrier et un adjoint parviennent en moyenne à paver une surface de 25 mètres par jour. Ce travail pénible les oblige souvent à travailler de nuit pour éviter l'agitation qui règne dans les villes la journée.
Mais l'étendue des trottoirs est telle que la trentaine d'ouvriers fonctionnaires de la mairie de Lisbonne ne suffit pas à couvrir l'ensemble des besoins de la ville. Alors, ils sont prioritairement affectés au centre historique de la capitale.
Pour le reste des trottoirs, simplement pavés de pierres blanches, sans motifs, la municipalité sous-traite la plupart du temps en faisant appel à une main-d'oeuvre essentiellement immigrée.
"Ces immigrants africains ou issus d'Europe de l'Est n'ont jamais été formés à cette technique. Ils apprennent sur le tas et font du mieux qu'ils peuvent, mais le travail laisse parfois à désirer", déplore M. Reis.
Main-d'oeuvre qui se raréfie, technique onéreuse, ce savoir-faire unique, qui s'exporte aux quatre coins du monde, est aujourd'hui menacé. Consciente du danger, la mairie de Lisbonne a créé il y a quelques années une école qui forme une quinzaine d'ouvriers par an à cette technique traditionnelle.
L'ouvrier poète Antonio Mateus, qui s'est initié à cet art décoratif urbain dans les années 1950, à l'âge de 14 ans, résume en vers la fragilité de ce métier: "On parle tant de réparer / mais je n'en vois aucun présage/ L'art du pavage/ est des plus désemparés".
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